EDITO
Lu Yu, le premier maitre de thé chinois nous révèle dans son Traité du Thé, le “Cha Jing“, en 780 , cette méthode ancestrale et poétique, toujours efficace plus de 1 200 ans après !
"Quand l’eau forme des bulles qui comme des yeux de poisson surnagent à la surface de l’eau, c’est la première ébullition.
Quand se forment des perles amassées sur le bord de la casserole , c'est la deuxième ébullition.
Lorsque l’eau moutonne, quand elle bondit comme des brisants, majestueuse, et résonne comme une vague qui s’enfle, c’est la troisième ébullition.
Si on poursuit l’ébullition, elle devient impropre à la consommation"
A chaque thé son ébullition.
Et s'il en était de même en matière de #reconversion et #creationdentreprise ?
Ce n'est pas par hasard que j'ai choisi J.Marc Cordes pour ce deuxième billet.
J'ai eu la chance de suivre son parcours riche en ébullitions, de poser mon regard de coach sur un formidable processus de changement et j'ai (encore) été bluffée :
Bulles, perles ou vagues, la créativité ne demande qu'à s'exprimer pour donner de nouvelles saveurs à nos vies.
Nb : Lorsqu'il a accepté de se prêter au jeu des questions d'Azimuth la pandémie de Covid 19 n'avait pas atteint l'ampleur que nous lui connaissons aujourd'hui .
"Pendant le confinement pour répondre à certaines demandes et pour ceux qui n'ont pas la capacité de se fournir dans le réseau partenaires : #Euskaren propose la livraison de certaines recettes déposées devant chez vous (selon zone géographique) Si vous êtes intéressés : RDV dans "OFFRE DU MOMENT" sur www.euskaren.fr !"
C'est l'histoire d'une reconversion réussie parce qu'elle répond à des valeurs fortes avant même d'échafauder des business plans rugueux, stratégies marketing et autres projets de conquête de marchés auxquels nous sommes sommés de répondre.
C’est une histoire de création de thés basques, de circuits courts, de liens forts avec le peuple des Karen en Asie.
Et moi, j’adore ça !
BIO
J.Marc fait partie de ces personnes généreuses et passionnées dont la seule présence diffuse du bien-être.
Ses recettes de thés élaborées à partir de produits locaux sont autant d'invitations à laisser infuser un peu de sérénité.
Il ne pouvait en être autrement, nous nous sommes installés confortablement : un thé savoureux, quelques mignardises et nous voilà partis.
Le regard pétillant il me présente les derniers packaging réalisés et me parle de nouvelles recettes en cours.
Je sais qu'il n'aime pas parler de lui, il a accepté pour que son expérience soit utile à celles et ceux qui traversent une période de questionnement et je l'en remercie chaleureusement.
Parle moi de ton parcours
"J'ai 43 ans et je vis à St Pée S/Nivelle au Pays Basque.
Après un Bac général je me suis orienté vers un DESS en Hôtellerie à Toulouse.
Pendant 17 ans j'ai travaillé à La Réserve à St Jean de Luz en tant qu'Assistant de
Direction, c'était un métier de passion et de plaisir, une façon d'être au service des personnes et de mener des projets vraiment intéressants.
L' hôtellerie est un secteur qui demande énormément d'investissement en temps et en énergie, il faut gérer le turn-over, former encore et toujours."
Comment s'est concrétisé ton désir de reconversion ?
"Avec le temps je sentais que je n'avais plus la même motivation, le déclic s'est produit au moment du décès de mon père.
Nous avons de profondes attaches avec l'Asie, mes parents étaient très investis dans l'Association "Les enfants du Mékong", j'ai ressenti le besoin de continuer cette mission à ma façon.
J'ai quitté mon emploi en novembre 2017.
Les premiers mois j'ai fait un Bilan de Compétences, c'était un arrêt sur image nécessaire pour mieux me connaître.
J'alternais entre des périodes de repli total et de contact avec les personnes de mon entourage.
J'ai aussi envoyé des candidatures spontanées en envisageant de travailler dans d'autres secteurs d'activités.
On parle beaucoup de compétences transversales mais c'est de la théorie.
Je me suis heurté à une réalité : les employeurs étaient difficiles à convaincre car je n'étais pas formé à leur activité.
C'est surprenant, dans l'hôtellerie nous recrutons souvent des personnes sans formation...
Pendant cette période je me voyais avancer sur un pont suspendu, j'avançais sans savoir où j'allais : quelle direction prendre ?
Le Thé c'était une idée parmi tant d'autres, il m'a fallu environ 6 mois pour passer de la réflexion à l'action."
NDLR : Tout changement déclenche un cycle de réactions en quatre grandes étapes.
Les deux premières phases sont dominées par l'action tandis que les suivantes sont spécifiquement existentielles.
Pourquoi ce projet ? A quoi contribue-t-il pour toi ?
"J'ai participé à une formation Création d'Entreprise (à la CCI de Bayonne) et j'ai commencé à écrire Euskaren : Quoi ? Pourquoi ? Comment ? Avec Qui ? Pour Qui ? ...
Tu sais, une boîte de Thé suscite la curiosité, sa dégustation est une expérience sensitive, olfactive, culturelle !
Pour moi la Qualité compte avant tout : j'ai expérimenté les premières saveurs, cherché le goût hors des sentiers battus.
Je ne produisais pas encore, c'était la période 100% créativité : un régal !
Le Bon est universel, il n'est pas réservé à l'univers du luxe.
Je voulais que mon projet valorise le terroir basque, les producteurs, restaurants, hôtels locaux et contribue à aider le peuple Karen."
Euskaren s’approvisionne auprès d’eux pour certains produits, et reverse 5 % de son chiffre d’affaires sous forme de dons à l'association pour permettre de poursuivre les projets d’éducation et les programmes de développement en ce qui concerne l’aménagement, l’agriculture et l’artisanat auprès des familles.
Quelles compétences as-tu acquises ? développées ?
"J'ai la chance d'être très bien entouré !
Je me suis formé à la gestion d'entreprise et j'ai été très encouragé sur l'ensemble des étapes qu'il s'agisse de la présentation du produit, son design ou sa composition.
C'est très dur d'être seul ! j'ai fait beaucoup de recherches, il faut se nourrir de l'histoire de ceux qui ont réussi."
Comment te sens-tu dans cette nouvelle vie ?
"Etre indépendant c'est un état d'esprit, de gros effort et beaucoup de temps...
C'est long, j'ai profondément changé mon rapport au temps.
Je me sens vraiment bien car je peux exprimer toute ma créativité, en totale liberté."
Ton plus gros défi ?
On éclate de rire car le défi réside justement à l'opposé de la liberté que nous venons d'évoquer : cadrer, planifier, établir des stratégies marketing c'est indispensable mais ça n'a pas la même saveur :-)
"J'ai du mal à répondre à l'injonction : quels sont vos projets à 3 ans, 5 ans ?
Je n'en sais rien, et si ça marche pas ? il y a beaucoup d'incertitudes, d'insécurité dans le statut d'entrepreneur.
Je plante des graines, certains clients sont fidèles, d'autres non...
J'ai une devise :
"Le Thé c'est comme le temps, tout est question d'appréciation"
Aujourd'hui je collabore avec des personnes extraordinaires :
J.F Maitia, Le Chef Fabrice Idiart, M.Txokola, Duplessis entre autres et c'est Top."
Qu'est ce qui serait WAOUH ?
"Retravailler avec Anaïs, ma compagne qui travaillais aussi à La Réserve.
On forme une sacrée équipe ! et pourquoi pas avec les filles, en famille...j'ai des idées mais chut ! pas de spoil...
Ca, ça serait vraiment Waouh !"
Un conseil pour celles et ceux qui sont tentés par l’entrepreneuriat ?
"Il faut s'investir à 150% et foncer !"
Tout comme le Thé, les rêves ont besoin d’infuser pour être savoureux !
Merci J.Marc d'avoir autorisé Azimuth à entrer dans ton univers :-)
Chaque jour je m’émerveille de découvrir des pépites d'inventivité, d’entraide, de solidarité comme autant de réponses impertinentes aux dégâts de l’individualisme et du règne de la réussite sans foi ni loi.
Même si ce monde ne tourne pas très rond, ici ou là, où que j’aille, émergent des résistances salvatrices, des créations réjouissantes, des initiatives portées par des personnes authentiques.
Contact Euskaren : facebook
Propos recueillis le 10 Mars 2020
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